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Union sacrée ! La guerre est déclarée.

On ne sait pas très bien à qui...

...mais c’est pas grave.

mardi 17 novembre 2015, par Frédéric Poncet

Après avoir hésité entre deux options possibles (voir La guerre à la Syrie est déclarée puis Finalement, on va réfléchir) qui correspondaient simplement aux choix des deux camps en présence, c’est hélas ! le parti de la guerre qui triomphe. Même si François Fillon (tout arrive !) fut la seule personnalité politique notoire à se prononcer publiquement en faveur d’une coalition avec la Russie, il s’est rangé à l’avis majoritaire au sein de la gérontocratie parlementaire : mieux vaut la guerre, même sous faux pavillon, que pas de guerre du tout. François Fillon reste un homme de droite.

Je ne reviens pas sur les arguments, maintes fois exposés, en faveur de cette lecture de la situation. Notamment, s’écarter de la religion des faits qui confond les évidences et les preuves (le "fait" que le soleil tourne autour de la terre a longtemps interdit de soutenir le "fait" opposé) ; rassembler un maximum de sources en évitant soigneusement de n’en sélectionner que des Françaises (divers organes de presse étrangers ont des sites internet en Français, la langue n’est donc pas un obstacle) ; toujours prendre le recul lors d’une lecture et se demander « d’où parle » la source ? [1]

Donc les mercenaires du soit-disant « état islamique », en réalité les mercenaires des Etats-Unis et de la France, qui occupent actuellement l’est de la Syrie (désertique mais pétrolifère) ont réalisé le plan d’une clique franco-américaine (Clinton-Juppé notamment) pour démembrer la Syrie sur des bases confessionnelles. Ce projet n’est même pas secret, le New York Times l’avait présenté en pages « opinions » en septembre 2013 (pour ceux qui ne lisent pas l’Anglais, regardez au moins la carte).

La France, plus exactement la clique Hollande-Fabius-Juppé et quelques autres, n’a pas fait mystère de son adhésion à ce plan : « Bachar doit partir », ne cessait de répéter Fabius quand il n’était pas encore malade. Elle a d’ailleurs réalisé, sous Sarkozy, la destruction de la Libye (cf. carte du New York Times) retournée depuis au moyen âge.

La Syrie était un plus gros morceau, et les Etats-Unis ne pouvaient plus se permettre d’envoyer leurs boys comme ils l’ont fait en Irak. Ils ont donc imaginé d’avoir recours à des mercenaires, en général des mécréants convertis à la va-vite au wahhabisme et à qui l’on explique que les chiites sont le pire ennemi (car l’Iran est chiite...) On oublie de leur dire qu’un musulman ne lève pas l’index gauche pour évoquer dieu (ou le prophète), mais ça c’est pas grave, les nigauds gobent toutes les histoires qu’on leur raconte, y compris celles des dictateurs qui bombarderaient leur propre peuple. Bref.

Maintenant que les mercenaires ont fait le sale boulot, occuper le « Sunnistan » (sans mandat de l’ONU, c’est un autre avantage des mercenaires) il va être facile de les en déloger et de proclamer ce « Sunnistan » libre et démocratique. Il sera l’ennemi naturel de ce qui restera de la Syrie, de l’Iran, bref c’est tout bon pour mieux régner sur le Moyen Orient. Ah oui et il acceptera sans doute le projet de gazoduc lancé en 2009 par le Qatar (c’est à dire Exxon-Mobil, c’est à dire les Rockefeller) pour alimenter l’Europe, mais qui était en concurrence avec un autre projet de gazoduc, de la Russie vers l’Europe. La funeste erreur de Bachar el-Assad fut peut-être de refuser le projet du Qatar pour favoriser celui des Russes ?

Donc, nous sommes en guerre contre la Syrie, pour de sales raisons, avec des motifs pour la plupart inventés de toutes pièces et, faute d’avoir réussi à obtenir l’abstention de la Russie et de la Chine à l’ONU, nous ne déclarons même pas officiellement notre ennemi.

Dernier détail : la Russie bombarde nos mercenaires depuis deux mois, et dans son cas ce n’est pas pour créer un « Sunnistan » mais pour en libérer la Syrie. Poutine et Obama font ce qu’ils peuvent pour éviter que le conflit ne dégénère, et Poutine qui n’est pas idiot est prêt à accepter le départ de Bachar el Assad si ça peut aider à la résolution du conflit (mais du moment que le processus se fait dans le respect de la constitution syrienne, bref pas de coup d’Etat). Obama quant à lui limoge à tours de bras les généraux fous-furieux du Pentagone, mais ça ne suffit pas et contre Clinton il ne peut rien faire.


Bref, nous sommes en guerre contre la Syrie et donc pas loin de l’être contre la Russie. Une pure folie.
Et d’envoyer nos mercenaires dans le Caucase ne nous épargnera pas cet écueil : les services secrets russes ne sont pas dupes. Ils savent très bien à qui ils ont affaire.


[1Lorsque Thierry Meyssan écrit sur le site du Réseau Voltaire, il écrit depuis Damas. On peut faire l’hypothèse qu’il n’est pas aussi libre de critiquer le Président syrien, qu’il l’est en ce qui concerne ceux des Etats-Unis ou de la France. De même, Sputniknews ou Russia Today soutiennent manifestement le Front National en France, ce qui peut les conduire à distordre la réalité pour favoriser les thèses de celui-ci. Une fois toutes ces précautions de lecture prises, il reste des éléments qui convergent vers une vision claire et cohérente de la situation géopolitique.