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Revoilà le projet de "Sunnistan"
Guerre à "daech" ou guerre à la Syrie ?
lundi 30 novembre 2015, par
La thèse dite conspirationniste d’un pseudo-état soit disant islamique mais vraie armée de mercenaires, confirme sa robustesse à l’épreuve des faits. Les conjurés se cachent à peine, protégés qu’ils se sentent par la stupeur d’une grande partie de la population, après les attentats du 13 novembre en région parisienne. Ils ont peut-être tort : le boycott de la cérémonie organisée par l’Elysée, par une vingtaine de parents des victimes -sur 130- et notamment la belle tribune d’Eric Ouzounian dans le Huffington Post, montre que l’aveuglement n’est pas de mise.
J’écrivais dans un article récent que l’intervention française accrue en Syrie marquait sans doute la fin de l’occupation de l’est de la Syrie et le nord de l’Irak par le soit-disant état soit-disant islamique, non pas pour restaurer la souveraineté de ces Etats sur leur territoire, mais pour y créer de toutes pièces un « Sunnistan libre et démocratique ».
Ce « Sunnistan » qui n’a pas encore de nom -on peut supposer qu’il ne s’appellera pas ainsi- est à nouveau évoqué dans le New York Times, cette fois par le très « conservateur » et fort peu pacifiste John Bolton, qui ne s’embarrasse même pas d’exiger que cet Etat soit démocratique !
Les indices se multiplient en faveur de la thèse selon laquelle le soit-disant état, soit disant islamique, ne s’est pas créé par hasard, ni parce que le wahhabisme aurait cette vertu de créer des Etats à partir de rien, mais qu’il est le fruit d’une expérience menée par l’armée des Etats-Unis dans la prison de Bucca, en Irak. Plusieurs versions des faits sont relatées par la presse anglophone ou francophone, à partir de témoignages d’anciens gardiens.
Les plus réticents à reconnaître la responsabilité des Etats-Unis dans cette affaire soutiennent que la chose s’est faite presque à l’insu des gardiens et de la direction du camp -sans doute trop laxiste, pourrait-on en conclure, quoique les images ne donnent pas l’impression d’un camp de vacances.
Les plus honnêtes laissent le sujet assez ouvert pour que l’hypothèse d’une expérience délibérée soit admise.
Que les méthodes violentes de certains prisonniers pour faire régner un certain ordre au sein de la prison aient été ignorées des gardiens, c’est évidemment totalement impossible.
Que ceux des prisonniers qui avaient adopté ce mode de « gouvernance » aient été libérés, au milieu des années 2000, est assez incompréhensible. Au nom des droits de l’homme ? Les suspects incarcérés à Guantanamo n’ont pas eu cette chance ! Personne en occident n’a mené la moindre campagne pour la fermeture de la prison de Bucca, dont l’existence était à peu près inconnue, et quand bien même : les actes que certains prisonniers y avaient commis aurait justifié leur maintien en détention de longue durée, dans des prisons de droit commun. Mais non : on les a relâchés. Sans autre explication, pour le moment. Fin de l’expérience ? S’attendait-on à ce qu’un ancien criminel plus ou moins psychopathe, redevienne un citoyen modèle après quelques années dans une prison où il avait carte blanche en matière de cruauté ?
Mais on ne mène évidemment pas une expérience sociale grandeur nature sur un cheptel humain, pour ensuite disperser ses cobayes dans les prisons du pays.
Le résultat de l’expérience est-il conforme à ce que souhaitaient les expérimentateurs ? A en croire les propos de John Bolton, voire plus récemment du député Français Alain Marsaud, on peut le supposer.
Il n’est pas certain qu’Alain Marsaud tienne encore le même discours après les attentats du 13 novembre à Paris. En revanche, John Bolton a publié son opinion dans le New York Times le 25 novembre : c’est pourtant en toute sérénité qu’il envisage la création de cet Etat, peut-être expurgé de certains des combattants du faux califat, mais globalement en prenant les mêmes, en les rebaptisant et sans même leur demander de devenir démocrates !
Une plaisanterie vue sur internet dit : l’Arabie saoudite, c’est un Etat Islamique qui a réussi. Le pire est que c’est vrai : ce que la plaisanterie ne rappelle pas, c’est qu’il s’agit dans les deux cas d’une créature des Etats-Unis. Et que, dans le cas de l’Arabie saoudite, comme le signale la carte de Robin Wright, ses jours sont comptés. L’Empire a décidé de redécouper la région. Nous voyons ses méthodes s’accomplir sous nos yeux. La France, hélas, s’est bien mal engagée dans l’affaire. Les attentats du 13 novembre semblent avoir décidé François Hollande à se rallier à la Russie, mais après avoir d’abord accompagné et même devancé le plan de l’Empire. Peut-être y a-t-il là l’explication des attentats, d’une toute autre nature que ceux de janvier dans lesquels nos services étaient impliqués, au moins dans la fourniture des armes. Ont ils précédé le revirement ou en sont ils la conséquence ? Si, comme le suppose ici Jean Tillaume, le commanditaire est le "parti du chaos", alors ils auraient peut être eu lieu quel que soit le choix de la France. Celui ci est motivé uniquement par le risque bien compris pour la France de se retrouver entraînée dans une guerre contre la Russie.