Accueil > Sécurité industrielle > L’accident est dû à une erreur humaine

L’accident est dû à une erreur humaine

mardi 17 mai 2011

Les "boîtes noires" de l’Airbus A330 qui s’est abimé en mer lors du vol Rio Paris AF447, ont été retrouvées. Alleluïa ! Des journalistes écrivent déjà : "’accident serait dû à une erreur humaine".

Leur prudence les honore. Je n’en ai pas tant. Sans même connaître le contenu de ces enregistreurs de vol, avant même d’avoir lu le moindre compte-rendu, fut-il journalistique, je peux déjà affirmer sans hésiter : l’accident est dû à une erreur humaine.

Mais une erreur de qui ? Des pilotes certainement ; mais pas seulement eux. Je n’énoncerai pas de liste, pour ne pas diffamer. D’ailleurs, je n’ai pas l’autorité intellectuelle requise pour prétendre analyser un accident d’avion. Mais je ne crois pas que des lutins soient intervenus dans cette catastrophe. Et je sais que tous les accidents de chemin de fer -tous- s’expliquent par de multiples erreurs humaines, et rien d’autre. Car les activités industrielles à risque sont ainsi conçues. On ne laisse pas le hasard s’en occuper. C’est ce que j’essaye de démontrer dans cet ouvrage.

Que les proches des victimes me pardonnent d’évoquer ainsi un drame sur lequel je n’ai rien à dire. Travaillant dans le domaine de la sécurité depuis plus de vingt ans, je ne peux simplement pas accepter que les concepteurs de machines qu’ils disent "sûres" s’en enorgueillissent quand tout va bien, et se réfugient, à chaque fois que la sécurité est mise en cause, derrière les acteurs de premier rang : pilotes, conducteurs, aiguilleurs, etc. Et refusent toujours d’accepter, dans la conception des systèmes, ce qu’ils considèrent comme une ingérence de la part des ergonomes, psychologues cogniticiens et autres pratiquants des sciences humaines. Ils auraient à y perdre un peu de pouvoir, la sécurité aurait beaucoup à y gagner.

P.S. (ajout du 29 juillet 2011) Qu’est-ce que je disais ? Le rapport du BEA est prêt, et les premières fuites ne révèlent rien de plus que ce qu’on ne savait déjà. Givrage des sondes de Pitot, informations vitesses incohérentes, équipage induit en erreur sur la situation réelle, mauvaise réaction. Tous coupables : le fabricant des sondes mais aussi ceux qui les ont homologuées, ceux qui ont décidé de les garder malgré les incidents à répétition, ceux enfin qui forment des équipages avec des connaissances d’ingénieur mais sans réflexe de pilote. Les seuls qui peuvent être dédouanés, ce sont les pilotes eux-même. Ceux qui ont commis l’erreur. Pourquoi ? D’abord parce qu’ils sont morts ; un peu de respect. Par la bêtise des autres, ingénieurs et décideurs, ils ont mis leur vie en jeu et l’on perdue. Ensuite, parce que contrairement à ces derniers, ils n’avaient pas le temps de réfléchir et de laisser mûrir leurs décisions. Eux devaient prendre une décision dans l’urgence, une vraie urgence imposée par les lois de la nature et non une pseudo-urgence comme les décideurs aiment s’en imposer à eux-mêmes.
L’équipage a commis une erreur, ou un enchaînement d’erreurs (du point de vue de la psychologie cognitive, ça ne fait pas de différence : face à l’urgence, on ne sort pas de l’erreur). Les autres, les décideurs, ont commis des fautes.


Voir en ligne : http://www.lefigaro.fr/actualite-fr...